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[usages élaborés par une profession ; non-professionnel ; acceptation]

Dans un arrêt du 4 octobre 2023, pourvoi n° 22-15.685, la chambre commerciale de la Cour de cassation s’est prononcée sur la possibilité pour un professionnel d’opposer les usages de sa profession à une personne morale étrangère à cette profession.

En l’espèce, une société a conclu un contrat avec une société spécialisée dans les armatures pour la fabrication spécifique et la pose d’armatures en acier.

L’une des parties décide de résilier le contrat et de demander le remboursement des sommes versées, soutenant que les conditions du contrat avaient été unilatéralement modifiées. Son cocontractant l’informe prendre acte de la résiliation et retient une indemnité forfaitaire en application des usages professionnels des armaturiers. L’autre partie décide alors d’assigner son cocontractant en remboursement de la somme retenue, prétendant que ces usages professionnels lui sont inopposables.

En appel, la Cour déclare les usages professionnels et conditions générales des armaturiers opposables à la partie pourtant non-professionnelle dans ce domaine. Cette dernière forme alors un pourvoi en cassation.

La requérante fait grief à la Cour d’appel de rejeter ses demandes, alors que selon elle, « les usages professionnels ne sont opposables à une partie que lorsque celle-ci est un commerçant ou professionnel du secteur d’activité concerné ». La requérante indique que lorsque tel n’est pas le cas, « le professionnel doit établir qu’il a remis à son client les usages et conditions générales qu’il entend lui opposer et que ce dernier les a acceptés ».

La Cour de cassation rejette le pourvoi au visa de l’article 1194 du Code civil, qui, selon la Cour, indique que « les usages élaborés par une profession ont vocation à régir, sauf convention contraire, non seulement les relations entre ses membres, mais aussi celles de ces derniers avec des personnes étrangères à cette profession dès lors qu’il est établi que celles-ci, en ayant eu connaissance, les ont acceptées ».

La Cour de cassation approuve le raisonnement de la Cour d’appel qui a retenu que la société demanderesse n’était certes pas une professionnelle dans le domaine des armatures, mais que « celle-ci avait commandé personnellement 50 tonnes d’armatures après avoir pris connaissance d’un devis laissant expressément à sa charge [certaines] prestations […], ce dont il ressortait que cette société disposait d’une compétence certaine en matière d’armatures ».

Plus encore, la Cour d’appel avait relevé que le contrat litigieux était effectivement soumis aux usages professionnels et conditions générales des armaturiers, puisqu’il mentionnait également que ceux-ci avaient été déposés au greffe du tribunal de commerce de Paris et que la société cocontractant « savait comment consulter le document de l’APA ».

Dès lors, la Cour de cassation en conclu que « [d]e ces constatations et appréciations, la cour d’appel a pu déduire que la société Delisle avait accepté que sa commande soit soumise aux usages professionnels et conditions générales 2017 de l’APA ». La Cour de cassation fait donc ici une interprétation extensive de l’article 1194 du Code civil, qui prévoit seulement que «[l]es contrats obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que leur donnent l’équité, l’usage ou la loi ».

Résumé :

Dans cette décision, la Cour de cassation juge que pour se voir opposer des usages professionnels, il suffit pour une partie, même non-professionnelle dans le domaine régi par ces usages, d’être susceptible d’en avoir eu connaissance et de les avoir acceptés. Dès lors, une société qui a conclu un contrat comportant une référence aux usages professionnels d’un domaine qui n’est pas le sien pourra tout de même se les voir opposer dès lors que ces usages sont disponibles au greffe du tribunal de commerce compétent et que la société en cause a pu en prendre connaissance.

Mahau FRENKENBERG

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