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[secret professionnel de l’avocat ; référé in futurum ; droit à la preuve]

Pour rappel, une mesure d’instruction in futurum permet « de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige » (art. 145 du Code de procédure civile).

Dans un arrêt du 6 décembre 2023, pourvoi n° 22-19.285, la Première chambre civile estime que le droit à la preuve du requérant est plus important que le secret professionnel de l’avocat.

En l’espèce, un avocat et une société ont conclu une convention de prestations juridiques. Presque dix ans plus tard, la société dépose plainte pour abus de confiance, soutenant que l’avocat a commis un détournement de clientèle et une rétention de dossiers. Suite à cela, l’avocat a résilié la convention.

La société a alors décidé de saisir le président du Tribunal judiciaire en référé, afin de demander une mesure d’instruction in futurum, sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile. Le juge a accordé cette mesure, en désignant un huissier de justice, avec pour mission de se rendre au cabinet de l’avocat et de procéder à la recherche de documents de nature à établir les faits litigieux.

À la suite de cette mesure, l’avocat a assigné la société en rétractation de l’ordonnance de référé, opposant le secret professionnel.

Saisie du litige, la Cour d’appel a ordonné la rétractation de l’ordonnance, a prononcé la nullité du procès-verbal établi par l’huissier de justice, et ordonné la restitution des documents appréhendés.

La société s’est alors pourvue en cassation, faisant grief à la Cour d’appel de s’être prononcée ainsi, alors qu’il résulte d’une jurisprudence constante « qu’il incombe au juge saisi d’une demande de mesure d’instruction in futurum de vérifier si la mesure ordonnée était nécessaire à l’exercice du droit à la preuve du requérant et proportionnée aux intérêts antinomiques en présence ».

La Cour de cassation casse et annule l’arrêt d’appel, faisant droit aux arguments de la demanderesse au pourvoi.

En effet, selon la Cour de cassation, « [l]e droit à un procès équitable, garanti par [l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales], implique que chaque partie à l’instance soit en mesure d’apporter la preuve des éléments nécessaires au succès de ses prétentions ».

Or, selon la Cour de cassation, « le secret professionnel de l’avocat ne constitue pas en lui-même un obstacle à l’application des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile dès lors que les mesures d’instruction sollicitées, destinées à établir la faute de l’avocat, sont indispensables à l’exercice du droit à la preuve du requérant, proportionnées aux intérêts antinomiques en présence et mises en oeuvre avec des garanties adéquates ».

Dès lors, la Cour de cassation décide que le droit à la preuve du requérant est plus important que le secret professionnel de l’avocat, estimant que la production de documents obtenus dans le cabinet de l’avocat est proportionnée aux intérêts antinomiques en présence.

Synthèse :

La Cour de cassation confirme sa jurisprudence selon laquelle le droit à un procès équitable implique que chaque partie à l’instance soit en mesure d’apporter la preuve des éléments nécessaires au succès de ses prétentions. La Haute juridiction l’étend même, puisqu’elle admet que le droit à la preuve du requérant peut s’opposer au secret professionnel de l’avocat.

Mahau FRENKENBERG

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