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[sol glissant ; responsabilité du fait des choses ; état de dangerosité anormale]

Rappel

Dans un arrêt du 15 juin 2023, pourvoi n° 22-12.162, la Deuxième chambre civile de la Cour de cassation s’est prononcée sur la responsabilité d’une société, engagée par une personne ayant chuté sur le sol enneigé et verglacé d’un chemin emprunté dans l’enceinte de la société.

En l’espèce, une personne a été conviée à un pot de départ dans l’enceinte d’une société. Alors qu’elle emprunte un chemin enneigé et verglacé pour se rendre à l’intérieur des locaux, cette personne chute et se blesse. La victime et son épouse assignent alors l’assureur de la société en réparation des préjudices subis. En appel, la Cour infirme la décision de première instance et déclare la société responsable. L’assureur forme alors un pourvoi en cassation.

L’assureur fait grief à la Cour d’appel de déclarer la société responsable et de la condamner à réparer les préjudices subis. En effet, selon l’assureur, « on est responsable du dommage qui est causé par le fait des choses que l’on a sous sa garde ; que les choses sans maître, res nullius, n’étant appropriées ni détenues par personne, ne sont sous la garde de quiconque ». Dès lors, selon l’assureur, on ne peut être responsable du dommage causé par la neige et le verglas. De plus, selon l’assureur « le gardien d’une chose inerte tel que le sol recouvert de neige verglacée suppose que sa présence ait eu un caractère anormal ; que c’est l’anormalité de la chose inerte, de par son état, sa position ou son fonctionnement, qui doit receler le dommage potentiel, la survenue de ce dommage n’étant pas en elle-même démonstrative de cette anormalité ; et que la preuve de l’anomalie d’une chose inerte pèse sur la victime » et « qu’en l’espèce, la société avait déneigé le chemin d’accès à la salle de réception qu’ont emprunté tous les autres invités, sans être victimes d’une chute ; que par ailleurs, [la victime] avait parfaitement connaissance de ce qu’il neigeait et faisait froid le jour de son accident ». Ainsi, l’assureur reproche à la Cour d’appel de ne pas avoir démontré le caractère anormal de la terrasse recouverte de neige et de verglas, qui n’avait pas pour finalité de permettre l’accès à la salle où les invités étaient conviés, puisqu’un chemin piéton avait été convenablement déneigé.

Décision

La Cour de cassation n’entend pas les arguments soulevés par l’appelante et rejette le pourvoi. La Cour de cassation soulève d’abord le lien de causalité entre le sol enneigé et verglacé et les préjudices subis par la victime. Ensuite, la Haute juridiction relève que la société était gardienne du sol à l’intérieur de sa propriété, puis précise « que cette chose inerte, en position normale lorsqu’elle permet le passage de piétons, ce qui est sa destination fonctionnelle, est en position anormale lorsque le passage est dangereux en raison de l’état de la chose, notamment lorsqu’il a été rendu glissant par des intempéries ». La Cour précise par ailleurs

que si la société avait effectivement prévu un autre passage, qui avait été déneigé, l’accès au chemin emprunté par la victime n’avait pas été fermé. Dès lors, la Cour de cassation confirme la décision d’appel, « qui a caractérisé que le sol dont la société était gardienne, recouvert de neige verglacée, présentait un état de dangerosité anormal au regard de sa destination, en a ainsi exactement déduit qu’elle avait engagé sa responsabilité ».

L’arrêt de principe Jand’heur1 a posé le principe général de la responsabilité du fait des choses et en a fixé le régime, aujourd’hui établi à l’article 1242 al. 1er du Code civil (anc. article 1384 al. 1er). Pour bénéficier de ce régime, trois conditions doivent être cumulativement réunies : une chose ; un fait de la chose ; et une garde de la chose.

  • S’agissant de la chose, il peut s’agir d’une chose corporelle ou incorporelle, dès lors qu’il n’existe pas de disposition spécifique.
  • S’agissant du fait de la chose, il faut que la chose soit matériellement intervenue dans la survenance du dommage et, qu’elle en ait été l’instrument. Cette condition pose un problème lorsque la chose est inerte et n’est pas entrée en contact avec la victime. Dans ce cas, le rôle actif de la chose ne peut être présumé, et la victime doit prouver l’anormalité de la chose.
  • S’agissant de la garde de la chose, la garde est caractérisée par l’usage, la direction et le contrôle de la chose (arrêt Franck, ch. réun., 2 déc. 1941).

Mahau FRENKENBERG

1 CCass., ch. réunies, 13 févr. 1930, Jand’heur

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